Richard - Le boss travaille, en paix !

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By S (S) on vendredi 30 juin 2000 - 00h17:

Le boss travaille, en paix !
(That's almost true !)


Qui c'est le Boss ? C'est le boss de quoi ? Le boss de qui ? Le Boss
qui rit... Le Boss qui vous dit : " Attachez bein vos tuques, mes
Ti-Luc, et puis vos pompoms aussi ! M'en vais vous en conter toute une
!"

Le Boss travaille pas toul' temps. Pas que c'est fatiguant, mais y'a
pas le temps, le Boss. Trop de choses à s'occuper. Le Boss faut qu'il
se mette le nez partout, faut qu'il aille fucker le chien chez le
voisin. Fuck the Boss !

Bien souvent, quand le Boss travaille, il fait semblant ! Il fait
semblant qu'il sait comment... Mais le Boss peut pas tout' savoir !
Sauf qu'yé supposé, ouais... Fait que, il fait semblant, le Boss !

Vous pouvez bien rire du Boss ! Mais dans le fond, dans le fin fond,
c'est pas drôle... Pas tout à fait'!

Maudit Boss ! Plus fou que lui, y s'en fait plus...

***

Cette fois-là, le Boss fallait qu'il aille rétablir la paix entre la
Coco-cola et les Mohawcks de Caughnawaga. Bien oui, dans le temps la
réserve ne s'appelait pas encore Kanawagea. C'était bien avant que nos
amis indiens fassent barrage du pont Mercier, qu'ils fassent la
contrebande de cigarettes, le commerce de la mari et des armes
automatiques. Bien avant que l'armée canadienne n'intervienne...

Un Ti-Gilles, livreur pour la Coco, avec pas trop de noix dans le coco,
avait tenté de voler des caisses de bouteilles vides au marché général
de la réserve. Ce qu'il ne savait pas le Ti-Gilles, c'est qu'un Johnny
le watchait...

Lorsque Ti-Gilles, l'épais, a inscrit 18 au sommaire des caisses vides,
le fier Johnny savait que le compte était de 22 ! Johnny y'était là
juste pour le Ti-Gilles ! Quand Johnny a sorti son long couteau de
boucher bien effilé, le Ti-Gilles a rajusté le compte à 22, espérant
bien pouvoir s'en sortir sans coups férir. Mais le Johnny, Gabriel de
son illustre nom, lui a dit que ce n'était pas assez ! Qu'il devait
rembarquer les 32 caisses pleines qu'il venait de livrer. Ou bien
dont... Ou bien dont, il lui trancherait la gorge !

Ti-Gilles a quasiment chier dans ses culottes, mais il a obéi au mohawck
! Ce n'était pas le temps d'argumenter, ni de rire... Oh, que non !

***

Le Boss, dans son bureau, dormait sur la clanche ! Quand il s'est
réveillé et qu'il a examiné les rapports de ventes pour le district 18,
il s'est bien douté que quelque chose de pas trop catholique s'était
passé. Il alla donc s'informer auprès du Ti-Oui Bujold, le représentant
preneur de commandes du district.

Louis Bujold, de trente ans l'aîné du Boss, en avait vu bien d'autres.
Louis connaissait bien son Boss, déjà trois ans qu'il était sous ses
ordres. Il avait compris qu'il avait affaire à un vrai boss. Un boss
qui médite transcendantalement ! Tellement pas croyable les histoires
qu'il pouvait conter, ce boss-là ! Que le travail peut-être un
agrément, si on s'arrange pour ne pas faire chier le monde... Fait que,
Ti-Oui, y'a tout dit au Boss... Que plus personne sur la réserve ne
voulait commander du coco-cola. Pourtant, c'est bon du coco-cola !

***

Sur la réserve, c'est en anglais que ça se passait ! Le Boss
baragouinait à peu près convenablement la langue du commerce. Et des
histoires d'indiens, il en avait lues plein !

Dans la première semaine de mai, semez !, qu'il disait le Boss. Semer
l'amitié vaut mieux que répandre le trouble à tous vents. C'est
tellement bon le coco-cola !

En prenant son insouciance sous le bras, il monta son Plymouth Fury V-8
bleu poudre et franchit le pont Mercier. Quand il arriva sur la rue
principale de la réserve, le calme régnait. À trancher au couteau,
pensa-t-il. "Je suis aussi bien de pas trop faire mon faraud !",
ajouta-t-il à voix basse.

Juste en face de l'église, où la statue de Catherine de Katawita jurait
dans le décor, le magasin général s’affichait impétueusement.
"Je me le garde pour la fin, mieux vaut savoir toute l'histoire avant
d'aller affronter la peur noire!" Et c'est sur ces sages propos, que le
Boss entreprit sa tournée du village.

Il entra dans un commerce dont il ne pouvait définir la nature. Une
vieille indienne accoudé à un comptoir le regardait farouchement.

- Nice day ! Gonna be warm later... Un coco-cola, please, Mam !
- No more coco-cola !
- Since when, Mam ?
- Since last night ! I've got the last six pack, yesterday night,
watching "The price is right".
- You just have to order some more, Mam ! We'll deliver next day !
- No way ! Go, go ask Johnny...
La vieille indienne n'en dit pas plus long. Le Boss n'insista point.
Il trouvait que c'était bien correct. Il savait désormais que la réserve
était à sec et que Johnny l'attendait ! Il déposa sa carte d'affaire
sur le bout du comptoir et il sortit de la bicoque en se dirigeant vers
le "barber shop".
À la porte du salon, un écriteau : " Gone for the day ! It’s golf day
! See you soon ! " Le Boss jeta tout de même un coup d’oeil par la
fenêtre fort empoussièrée. Il y vit une femme dans la trentaine qui
s’acharnait à coups de pieds sur la distributrice de coco-cola, avec son
petit qui braillait sans retenue sur sa hanche. Le Boss se risqua à
entrer, trop curieux qu’il était !
Aussitôt qu’il mit les pieds dans le semblant de salon de barbier, la
jeune femme l’apostropha.

- It’s about time ! What the hell you were doing ? Can’t you see that
my baby is missing his cola ? I’ve tried to feed him with Pesi, but
coco-cola is the real thing !
- I’ll do my best, lady ! Be sure of that!
- So, let’s go, move your hass, you hasshole ! I can’t stand it
anymore, we want our coco-cola !
- I’m already gone, lady ! Have a nice day !
- Go fuck yourself ! It’s not a nice day. Can’t you ear the cryes of
my baby ?
Le Boss, était loin d’être sourd et il ne souhaitait pas le devenir !
Il s’éclipsa donc, sans rien ajouter. La journée était encore jeune et
lui de même. " Faut que je sauve ce pauvre monde de la déchéance, ça
n’a pas de bon sens de nourrir ses petits au Pepsi ! "
Perdu dans ses pensées de Quichotte à la noix ce coco, le Boss
déambulait sur le supposé trottoir de ciment, quand un gros chien laid
vint le renifler. Le Boss n’avait jamais eut peur des chiens. Avant
même d’avoir bu son premier coco-cola, il avait appris à leur parler. "
Salut, le chien !, comment ça va ce matin ? Tu peux venir me sentir,
j’te donnerai pas de coup de pied au cul ! As-tu mangé aujourd’hui ?
Me semble que tu n’as pas l’air bien gras. " On peut dire n’importe
quoi aux chiens, ils comprennent ça, eux-autres, le n’importe quoi !
Tout dépend de comment c’est dit !
Le chien laid ne répondit pas au Boss, il se contenta de le regarder
dans les yeux. Cet instant aurait pu s’éterniser encore bien longtemps,
le Boss n’était pas nerveux, le chien à peine. Mais un siffle strident
se fit entendre et l’animal se sauva en coup de vent. Le Boss tourna la
tête pour voir où la bête se dirigeait, pour voir d’où provenait le
siffle strident. Mais il eut tout juste le temps de voir une porte qui
se refermait. Et toujours le silence qui régnait. " Sont donc bien
sauvages, ce monde-là ! "

Le Boss commençait à avoir faim, son petit déjeuner était loin. Il
entra donc dans une cantine qui n’avait pas bonne mine. Bien entendu,
la place était vide, seul le cuisinier aux cheveux bien gras affichait
sa binne farouche derrière le comptoir d’une inquiétante propreté.
Le Boss n’eut même pas le temps d’ouvrir la bouche que le cuisinier lui
dit : " You know it, ain’t have a single coco-cola for you ! Better do
your job before anything else ! And hurry up, I’m loosing money and
it’s your fault ! So, go away ! Johnny is waiting for you. " Le Boss
ne fut pas trop impressionné par les propos du guerrier cuisinier. Il
prit le temps de défaire sa cravate et de la fourrer dans sa poche
revolver avant de répliquer : " Want you please give me a glass of
water, I’m fuckinly thursty ! After that, I’ll do what I have to do ! "

Le Boss but son verre d’eau d’un trait, parler anglais lui asséchait le
gosier en lui laissant un arrière-goût inqualifiable. Il fouilla dans
ses poches pour en retirer un vieux deux piastres tout chiffonné, avec
une face de reine à fesser dedans et le déposa sur le comptoir en disant
:. " You can keep the change ! ", et le Boss de sacrer son camp en
laissant le mohawck tout éberlué par son franc parler.
Le Boss marchait sous le beau soleil de mai. Pensif, ne sachant pas
trop comment il allait s’y prendre pour amadouer le terrible mohawck.
Il en avait appris assez, il ne lui servait plus à rien de poursuivre sa
tournée. C’est au Johnny Gabriel qu’il devait s’adresser. Il continua
tout de même à s’éloigner du but à atteindre et rendu au bout de la rue,
il enleva sa veste et la déposa sur un coin de gazon approximativement
vert. Après avoir jeté un coup d’oeil en direction de son calvaire, il
s’assit sur sa veste en adoptant la position du lotus pour méditer. "
Aïma, aïma, aïma... ".
Après les vingt minutes réglementaires, il se sentit plein d’une énergie
débordante. Il se releva, prit sa veste de la main gauche et avec
désinvolture la fit atterrir sur son épaule, gauche elle aussi !
Le Boss entreprit alors sa remontée au travers le village. Le sourire
aux lèvres, il défiait les ombres blotties derrière les fenêtres
sombres. À coeur vaillant rien n’est impossible, qu’il se disait le
Boss.
Enfin rendu à destination, le Boss demanda tout de go, au premier venu,
à parler à Johnny.

- I’m Johnny Gabriel, and you are the man from the coco-cola.
- Please to meet you, my friend ! Got something to smoke ?

L’indien au visage émacié, quelque peu désarçonné, sortit son paquet de
Player’s Navy Cut et le tendit au Boss.

- Ain’t you have anything else ? You know what I mean ?
- Ho, Yeah ! I see ! Come on, follow me, we’ll go down stairs...

Tout en bas de l’escalier, gisaient pêle-mêle toutes sortes de
provisions : Des caisses de bières, des caisses de Pepsi pleines, des
caisses vides de Coco-cola, des caisses de cigarettes américaines et
autres babioles sans importance. Le Boss suivait le mohawck qui le
menait à son officine. Cela prit un certain temps avec qu’un des deux
n’ouvre la bouche. Ils tournaient fort possiblement tous les deux leur
langue sept fois avant d’oser engager la conversation. Parfois, il vaut
mieux laisser de côté les vaines paroles...
Le peau-rouge sortit de sa poche un trousseau de clefs et déverrouilla
la porte avant de l’ouvrir. Le Boss suivit son hôte dans l’antre
secret.

- Sois le bienvenu dans mon humble repère, homme qui prie les cieux !
- Le plaisir est le mien ! répondit le Boss en s’assoyant à même la
natte qui couvrait le sol.

Le Boss n’était aucunement surpris par le français du mohawck, pour lui
cela allait de soi qu’un chef soit cultivé. Le maître des lieux sortit
d’un grand coffre un narghilé à deux becs et un sachet rempli de fines
herbes. Il en versa une impressionnante quantité dans le fourneau du
narghilé.

- Du colombien ? demanda le Boss.
- No way, du kanawagea, je l’ai moi-même cultivé !
- Alors, faisons honneur à ta culture, mon ami !

Le mohawck sortit une longue allumette et mit le feu au mélange
précieux. Ils fumèrent tous les deux en respectant un ample silence.
Les traits de l’indien se détendirent, ceux du Boss sourirent. Leurs
têtes commençaient à joyeusement leur tourner. Après avoir inhalé les
dernières bouffées, ils se regardèrent longuement dans les yeux sans
broncher.

- Tu me sembles être un homme sage malgré ton jeune âge, visage pâle !
- La sagesse est de savoir apprécier la vérité, d’écouter le vent
siffler et de ne pas embêter inutilement son voisin. Voilà ce que je
dis au chef que tu es !
- Tu boirais bien un peu de cola, j’imagine ? J’en ai gardé deux
bouteilles bien au frais.
- Ce n’est pas de refus ! Après nous discuterons du petit problème qui
m’amène.

Le chef sans plumes se retourna et sortit de la glacière deux bouteilles
de coco-cola bien givrées et les ouvrit, il en tendit une au Boss et dit
:

- À la tienne, homme sans gêne !
- À la nôtre ! Que ce breuvage coule dans nos veines et effacent nos
vaines fâcheries !
- Ouais ! Mais ton homme a tenté de me voler !
- Tu ne le reverras plus jamais, c’est la promesse que je te fais !
- S’il en est ainsi, buvons !
- Oui, buvons à notre félicité !
- Bien parlé, mon ami !
- Une dernière chose, avant de te quitter...
- Quoi donc, grand Boss ?
- Si un jour, un Samuel au regard gris met les pieds sur ton territoire
sacré, prends bien soin de lui !
- Ainsi il sera fait, tu en as ma parole !

Et c’est ainsi que prirent fin les délibérations entre le mowack et le
Boss. Chacun retournant à ses occupations.

***

De retour à son bureau, la tête toujours dans les nuages, le Boss
apostropha le Ti-Gilles :

- Tu ne mets plus les pieds sur la réserve ! C’est compris ?
- Oui, Boss ! Pas besoin de me le dire deux fois !

Le Boss s’alluma une Gauloise blonde et inhala profondément la fumée.
Il faillit s’étouffer lorsqu’il se mit à rire en pensant à ce qui
s’était passé en cette belle journée de mai. Ti-Oui passant par là
demanda :

- Qu’est-ce qui se passe Boss ?
- Rien, rien, mon Louis ! Oublie pas d’aller chez les indiens demain !
- Les Indiens ne veulent plus commander de coco-cola, Boss, vous le
savez bien !
- Ça, c’était avant que j’aille leur parler, mon Louis ! Tout est
arrangé ! Maintenant, tu n’as plus rien à craindre de leur part !
- OK, Boss ! Ils sont sûrement à sec ! Les commandes vont être bonnes
!
- Tiens ! Pendant que j’y pense, apporte donc un six-pack à la femme du
barbier, son petit est en manque de coco-cola...
- Oui, Boss ! C’est tellement bon du coco-cola !


Richard


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