Souveraine en ce refus de Rien
Les mots seraient-ils ces sujets fragiles qu'on subordonne et qui vous mènent ?

Reine d'un temps qui ne souffre aucun règne
L'objet de mon pouvoir s'échappe dans le flot des mots
Et l'effort de ma quête s'essouffle dans le silence qui règne
En maître, oui, en maître

Souveraine en terre de contradiction je toise le mépris des autres, je recueille leur amour
Rosée précieuse à l'orée de quelque désert

En tête de cohortes déployées jusqu'à l'extrême de tout conflit
Je nie encore que l'impossible soit là
Et les verbes
Et les noms
Sont les objets de vie qui ceignent mon aphasie

Souveraine vaincue en ce refus de Rien
Je cède, je cède et me soumets
Et de ma main qui puise aux styles anciens l'eau pour une inextinguible soif
Coule un chant muet
L'écrit si pur que chaque griffe sur le papier sonne comme un cristal dans le silence alentour

Vaincue et souveraine dans le refus de Rien
J'inscris les mots, fleuves de sons dans un lit de mémoire
Et je suis reine une fois
Peut-être une seule fois
Et mon refus est ce Oui de l'écrit
Quand la parole est entier reniement, révolte sans fin devant l'innommable

Souveraine enfin en l'écrit qui s'affirme et dit oui
Oui à mon âme qui ose penser Rien
Oui à mon corps qui sent l'absence
Oui à des mots, ces mots de tous dont j'hérite chaque jour un peu
Oui à l'angoisse qui toujours se tient en maraude

Oui, mais oui, c'est bientôt l'aube