Une carte postale

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By Yvan Hesbois on Unrecorded Date:

Essai d'archéologie au présent : Esquisse pour une ville.

La ville est mon labyrinthe, si tu étais cette ville, je m'y perdrais, chaque jour, à jamais, en toi, ici.


Aux pieds de la cathédrale de Chartres : Le soleil n'est pas de mon coté, par contre, un vent quasi glacial m'oblige à résister pour ne pas fuir cette terrasse. Je viens de commencer la lecture de "Ewald Tragy" de Rainer Maria Rylke. Dont l'exergue dit qu'il préfigure "Les cahiers de Malte..." Je suis obliger de tenir cette carte sinon elle s'envole. Mais en fin de compte, peut-être que ce vent la soufflerais jusqu'à toi ? Lorsque nous regardons les flèches de la cathédrale, si hautes, le déplacement des nuages nous donne l'illusion d'un mouvement. C'est un immense navire de pierres, un navire gothique. D'où je suis, les vitraux sont peu présents. J'entends les cloches sonnant la demie... Muse, Muse Muse Muse, la lumière est chez toi, la chaleur avec et ici, comme les Ardennes d'Arthur, où je vécu, moi aussi, enfant, c'est l'enfer du froid... Car l'enfer n'est pas que le feu. Je comprends qu'il ait pris la fuite vers Aden et le Harar. Je compte les jours qui me rapprocheront de chez toi. Impatient et en même temps, j' essai de goûter chaque instant de cette attente. Je ne sais pas quel est le degré de réalité de ma vie, de mes rêves, néanmoins, ils me font vivre une période joyeuse. Muse, Or et Soleil A TOI !
Le vent se transforme en tempête, les objets "décollent" de terre.


Si tu étais une ville, si tu étais La ville où convergent les mille lumières, les mille soleils, j'entendrais quelques chants lyriques. Si tu étais la ville aux mille temples, cette même ville aux mille fenêtres, faites de mille éclats de couleurs pour les mille lumières, je serai le voyageur. Je parcourrai cette ville, j'emprunterais les mille chemins, les mille rues pour en découvrir les mille secrets. Tu serais la ville et je serai ton touriste, je ne ferai que passer dans tes murs, mais j'y prendrais goût et reviendrais chaque été. Si tu étais la ville, je serais ton voyageur, le marcheur qui arpente tes rues, qui traverse ton territoire. Celui, infatigable qui cherche le secret de tes charmes. Si tu étais la ville, loin de moi, je rêverai que tu es celle des mille édifices et je te rendrais visite. Comme un seul homme, noyé, perdu dans la foule, j'irais chaque jour sentir ton parfum fait de mille parfums. Si tu étais la ville, celle aux mille lumières, celle béni par les cieux au travers de sa multitude de fenêtres éclairantes, je viendrais chaque soir admirer les scintillements de tes mille parures. Puis à l'aube, lorsque la lumière est pour moi la plus blanche, je reviendrai encore, et je ferais une prière pour louer ta beauté, pour te remercier et pour te demander de me bénir à mon tour. Si tu étais une ville, je viendrais chaque jour aux portes de ton enceinte, me souvenir de ton histoire. Et le long de tes rivières je rêverais d'amour. J'emprunterais tes plus beaux ponts pour contempler les nuages tombés dans l'eau. Je me souviendrais alors de tes discours, de tes chants, de tes cris, de tes plaintes et de tes joies. Je serais un nouveau témoin, l'anonyme, celui qui est de passage mais peut-être que ton charme m'obligera à demeurer en ton sein, dans tes murs. Ce sera ton invitation à faire de moi un peu plus qu'un visiteur, un peu plus qu'une ombre passante, je serais peut-être ton voyageur privilégié. Celui que tu garderas pour toi, un peu comme un couple d'amoureux qui ne peuvent plus se quitter. Alors, je prendrais chaque jour les objets de ma fortune : Mon cahier et mon stylo et pour te parcourir amoureusement, je remplirais des pages et des pages d'une écriture inventée pour toi. Le bitume de la rue deviendrait mon tableau noir. Chaque quartier serait un nouveau cahier. Au matin, la pluie laverait mon tableau emportant toutes mes traces de craies dans l'eau du ruisseau, mes rêves et mes erreurs avec. J'inscrirais la date, l'heure de ce nouveau jour comme celle d'une naissance. J'appellerais ces écrits : "Les cahiers de Chartres", sorte d'hommage au poète... Une écriture entièrement dédiée à ce que tu serais, si tu étais la ville aux mille lumières. Oui, chaque jour, je pourrais prendre ce baluchon de chroniqueur et peut-être que ma fortune me permettra d'emporter de quoi capter des images. Alors je serais combler et j'irais me perdre au sein de tes mille charmes. Ce jour là je serais heureux, tu seras comme une muse, LA Muse. Je partirais de mon refuge en homme libre, libre et fragile comme une feuille détachée de l'arbre. Et comme cette feuille je volerais de place en place, de pierre en pierre pour m'imprégner de toutes tes couleurs. Je garderais une trace de tout ce que tu es pour entendre en résonance et en pleine mémoire le plus infime, le plus ténu de tes chants. Si tu étais une ville, ma Muse, j'irais à ta rencontre. Je commence toujours mes voyages par la périphérie, je préfère retarder, repousser le moment de la rencontre, l'instant d'une découverte, c'est une manière de faire durer le plaisir, ne jamais aller directement au cœur, à l'endroit où tout le monde se presse. Non ! Jamais ! Je préfère l'attente, la patience et cette douce souffrance de s'obliger à faire reculer le plaisir pour le rendre encore plus grand, encore plus beau, encore plus intense. Dés lors, je ne saurais plus ce que je suis, je ne suis plus vraiment moi-même, c'est à dire celui que je connais au quotidien. Je deviens autre chose, un autre, je ne suis peut-être même plus un homme, je ne suis peut-être même plus un humain. Je suis une feuille poussée par les vents, je suis le chant montant dans les frondaisons, je suis l'oiseau sur le bord de la fenêtre, le lézard sur les marches du temple. Mais je peux aussi être une feuille de papier, un journal déplié par un courant d'air, les pétales d'une petite fleur poussant entre deux pierres, précisément là où le rayon de lumière vient s'éteindre au crépuscule. Dés lors que je suis dans la ville je deviens la ville. Je suis les passants, je suis le livre qu'ils ouvrent à l'étal du marchand. Je suis les bijoux dans la vitrine, l'incroyable éclat du diamant, je suis la pancarte indicatrice. Je suis celui qui embrasse sa compagne sur le banc public. Le soleil vient nous caresser, le ciel nous béni, notre chant se répand dans toute la ville pour tous les amoureux. Qui connaît Romanin, ouvrons le livre de Tristan Corbière : "Armor" et découvrons les eaux fortes de Max : "Le chef du peuple de la nuit". Une petite terrasse de café, invisible de la rue. Je n'ai pas pus faire autrement que d'aller me recueillir sur le monument dédié à "Max". En quelques secondes, pendant que je lisais les mots gravés dans le granit, j'avais les larmes aux yeux. Pourquoi ais-je cette chance d'être de ceux qui sont là ? Ceux qui ont hérité de la liberté. Nos prières ne seront jamais assez fortes pour remercier et louer ceux qui par leurs combats, leurs sacrifices ont grandi l'humanité à chaque fois que d'autres s'ingéniait à la détruire. Et moi je suis là, "tranquille", voyageur, visiteur, touriste, homme de passage, et mes responsabilités sont de toute autre nature, leurs "gravités" sont à l'échelle de ma culture. Oui, je suis celui qui à peut-être la chance d'être passant, ses engagements sont "marginaux". Qu'est-ce donc qu'une ville ? Qu'est-ce donc que découvrir, visiter, voir une ville ? J'aimerais te parcourir en pleine sérénité, en pleine lumière. Je me laisserais aller au gré des rues, des places, évitant les lieux trop bruyants, les endroits trop fréquentés. Si tu étais la ville, je chercherais tes endroits discrets. Au fond, Ils seraient ce que j'appellerais les lieux de l'intime. Oui, si tu étais la ville j'irais à ta rencontre en ce que tu as de plus calme, de plus simple, de plus naturel, de plus caché peut-être. Tu vois Muse, tout peut arriver en ces lieux discrets, même le don : Mon unique voisin, sur cette petite terrasse intérieure, à peine installé doit repartir, alors il m'offre son café. Je viens juste de repenser à l'histoire du tableau, je ressens un peu cette écriture, je revois ses images, n'ais-je pas été influencé ? Muse, si tu étais la ville, tu serais cette terrasse. Et je te dirais au revoir au bout de quelques instants, non sans avoir lu quelques pages d'un autre livre, celui de Raymond Depardon : "Les fiancées de Saïgon". Livre que je garde très précieusement, parce qu'il est pour moi une sorte de bréviaire du voyageur. Ce voyage dont nous avons parlé, ce voyage dont nous reparlerons et que j'aimerais tant faire avec toi. Ce voyage, tant de fois rêvé, tant de fois repoussé. Ce voyage, à faire le plus loin possible de moi-même, avec toi, avec toi, avec toi… Tu serais la ville et tu serais le voyage, tu serais l'air que tout citadin respire. Tu serais le temps qui me permettrait de vivre, d'être et si tu étais cette ville, je resterais longtemps ton visiteur, ton voyageur. Alors, j'irais acheter une belle carte postale, je prendrais le temps de la choisir. Et de préférences, ce serait une image de lumière, la plus flamboyante. Et je voudrais t'offrir le livre du voyage, immédiatement, dans mon impatience, je m'éloignerais de la plénitude, du calme. Je redeviendrais comme avant, comme tout arpenteur idiot, je perdrais la mesure de l'essentiel. Alors j'ouvrirais une nouvelle fois le livre du voyage, celui du cinéaste, de la femme aimée et du désert. Je relirais encore cette réflexion de lui que j'aime tant : "Faire un film d'amour. Peut-être faut-il d'abord le vivre ? " C'est si vrai à mon sens. Et chaque fois que l'on en parle, on se retrouve dans un espace d'action relative. Voilà, j'ai pénétré le sanctuaire, je suis entrer dans le temple des temples. J' ais repris la même place qu'il y à quelques mois, ce bureau sur le côté. En arrivant, devant mon air songeur, la personne de l'accueil me propose de visiter la crypte… Je lui réponds le plus gentiment possible que je préfère une autre fois. Et j'en profite pour lui demander s'il n'y aurait pas une table pour que je puisse écrire. Alors généreusement elle me propose d'utiliser un coin de son bureau. Bien qu'étant dans une petite partie, presque négligeable, tout y est monumental : Les baies, le christ qui semble me regarder, les voûtes, les portails et les tableaux. Au fond, dés que l'homme cherche à s'élever, à se grandir, peut-être avec l'espoir de séduire les dieux, il est capable de faire des choses grandioses. Mais tous ces chefs-d'œuvre suffiront t'il à combler l'abîme, cette déchirure dans la mémoire de l'humanité, creusé par nos crimes ? Si seulement les milliers de visiteurs faisaient des milliers de prières pour racheter les fautes de l'histoire. De la crypte aux flèches en passant par le labyrinthe, je reste le voyageur, je reste le visiteur. Si tu étais la ville, tu serais cet édifice monumental, ce temple gothique, ces pierres médiévales. Tu deviendrais une roche colossale, une pyramide gothique totalement dédiée à la croyance. Croyance au sublime : La foi ! Mais qu'est-ce donc que d'avoir la foi ? Les moniales parlent d'amour, moi aussi, j' essais. Et justement, de l'amour, que savons-nous ? La plus que vive… Presque en face de moi, Marie Madeleine et le Christ, en marbre, grandeur nature. J'aime bien Marie Madeleine. Si tu étais cette ville, tu serais ce temple et si tu étais ce temple tu serais cette sculpture. Alors, étant cette sculpture tu serais peut-être cette Marie, mais moi aussi je serais Marie. Tu serais elle qui serait moi et moi je serais elle qui serait toi. Parce que nous somme toujours fait des autres et que les autres sont fait de nous. Et que connaîtrais-je du temple, et de toi ? On raconte que Marie Madeleine à laver, parfumer et sécher les pieds de Jésus et que ce parfum n'était pas la myrrhe mais le nard. On dit aussi que le geste de Marie serait une métaphore de l'embaumement et ce que je ne savais pas, c'est que Marie sécha les pieds de Jésus avec ses cheveux. Il faudra que je revienne aux "flèches", que je remonte tout là haut, pour faire des images. Mais je me demande s'il ne faudrait pas se limiter aux images qui montrent ce qui est à la hauteur de nos yeux ? Pourquoi ce désir de capter ce qui est loin de nous ? Inaccessibles étoiles… Pourquoi vouloir toujours emporter avec soi ces images de papier ? Et connaissons nous vraiment ce qui est à la hauteur de nos yeux, ce qui est si proche de nous ? Si tu étais la ville je serais citadin et je ne voudrais pas que tu sois inaccessible car se serait une souffrance. Habitant de la ville ou passager j'aime les choses tangibles, les choses douées de vérités. Le voyageur s'oppose au virtuel. Alors si tu étais la ville je partirais à ta rencontre, je partirais te retrouver du plus cachée que tu serais. Si tu étais la ville et moi le voyageur, je viendrais te retrouver dans l'intimité de tes lumières matinales et nocturnes. Je chercherais toujours à me rapprocher de toi comme de la lumière divine. Et ici, à cette heure, je la vois, je la découvre, elle traverse les fragments de verre des immenses fenêtres. La baie devient l'œuvre ouverte, l'ébrasement se métamorphose en champ pictural et mon âme s' envole en passant de l'autre coté de la fenêtre. Alors je pense à toi ô ! Muse, je pense à toi, je pense à toi, je pense à toi. Si tu étais cette ville de lumière, si tu étais cette cathédrale, je serais avec toi, nous serions ensemble. Il y à quelques mois j'ai choisi un détail d'une lancette, un tout petit détail, avec sa reproduction sur carte postale : Un porteur d'eau. Aujourd'hui, ce choix n'à rien perdu de son sens. Je reste le chercheur d'eau… Et je peux racheter un exemplaire de cette carte pour t'écrire et te dire que je pense à toi, comme à cette eau, bleue comme le ciel. Te dire que je suis au cœur de la ville, mais que par magie, ce cœur de ville est un territoire protégé, calme comme un cloître d'abbaye, serein comme un jardin japonais. C'est donc le lieu, l'instant du recueillement. Si tu étais cette ville, je serais donc très proche de ton point d'immanence et de rémanence. Si tu étais cette ville, je serais Marie Madeleine et avec l'eau parfumée de nard je baignerais tes pieds, comme l'eau de la rivière baigne ceux des ponts. Je serais le pêcheur parmi les pêcheurs. Si tu étais cette ville, je ne voudrais plus te quitter mais m'installer chez toi. Je repense à cet artiste peintre cherchant la lumière de manière effrénée et qui un jour, débarqua en Arles. … Quelques angoisses traversent les lieux, la culpabilité, nous traînons toujours des éléments de culpabilité. Si tu étais la ville, tu serais aussi les gens. Et parmi eux il y aurait moi, avec un parfum de nard… Cette plante à l'odeur de terre, rarissime, que l'on trouve vers l'Himalaya. Est-ce une odeur de sainteté ? Bien au delà des bâtiments, des places publiques, des rues, des monuments, au delà de tout ce que la ville à de matériel, de physique, il faut percevoir "la non-évidence". Ce qui subsiste d'énigmatique, d'indicible, derrière les pierres, des choses profondes comme l'angoisse. Et là, il n'y à plus de rôles qui tiennent, il reste une solitude sombre, sans appel pour tous ceux qui regardent les choses en face, dans le blanc des yeux. Ces incidences comportent peut-être quelque chose de sournoisement ridicule. Si tu étais la ville, tu serais la vie et la mort. Tu serais cette eau ténébreuse qui trempe le corps du voyageur au soir de sa vie. Tu serais de toutes naissances comme de toutes morts. Tes murs sanctionneraient les mille angoisses des terriens. Les mille angoisses des hommes et des femmes de la ville. Tu serais la maladie, la contagion universelle. Et ce soir là aucune cathédrale au monde ne pourrait suffire à essuyer les larmes générales, larmes de tristesses, larmes de peurs, larmes de douleurs. Même la lumière serait à la merci de l'obscur. Chaque passant, chaque marcheur, chaque homme et chaque femme porterais ce poids immense, cette charge de malédiction en regard de l'histoire. Charge toujours plus lourde. Si tu étais la ville tu serais génératrice de désespoir et de mélancolie. Tu serais la mort, la fin du temps, la fin des amours, même les plus fous, tu serais l'ombre sur le tableau et personne ne pourrais t'échapper. Et moi, je serais toujours ton voyageur, celui qui passe et que tu prendrais dans tes filets. Je tenterais de me sauver avant de lâcher prise, en cherchant tes recoins, tes porches, tes endroits secrets. Oui, je chercherais désespérément à sauver ma peau, mais je comprendrais vite que rien ni personne ne pourrait me cacher de toi. Si tu étais la ville tu serais tout les regards et rien ne pourrait m'abstraire totalement de ton emprise. Vivant au sein de tes murs, je serais comme les autres, je fournirais ma part de tension. Si tu étais la ville, tu pourrais être mon ennemie, et comme les autres tu me regarderais en étranger. Tu me montrerais du doigt, tu me dénoncerais comme celui de la différence. Et beaucoup profiteraient de l'occasion pour se jouer des paradoxes de la nature humaine en évacuant un trop plein de rationalité. Si tu étais la ville, tu apprendrais le goût de la haine et la soif qu'elle déclenche. Alors au lieu de m'aimer, moi celui du voyage, celui qui porte ses propres croyances, tu ordonnerais qu'on me chasse en te lavant les mains. Et plus tard, de pertes de droits en pertes de territoires, tu finirais par t'en prendre à ma personne. Tu deviendrais une ville noire. Si tu étais cette ville, tu serais la mémoire. Parfois, au coin d'une rue, au dessus d'une porte, à l'ombre d'un arbre sur une petite place ou en plein carrefour, une plaque, une sculpture, témoigneraient de ce que tu as été. Il y aurait des demandes de pardons, des sourires abjects et des murs de plaintes. Tu finirais par accorder à chacun ce don d'existence qui justifie la notion d'humanité. A ce jour et à cette condition je pourrais commencer à revivre, je pourrais commencer à comprendre ce qu'il m'était arriver, je serais changeant. Je laisserais ma peau d'errant pour un engagement dans la cité, pour être engager dans ma propre vie, capable de dénoncer la moindre angoisse, la moindre culpabilité, capable de tenir le combat vers une vérité. Mais ceci est une parcelle d'utopie. Si tu étais la ville, tu serais aussi ce dépassement de soi fait de désirs, de révoltes, et d'acceptations. Il faudrait, si tu étais cette ville, Muse, que tu sois la lumière, pour la sauver de l'obscur. Si tu étais la ville tu serais la résurrection et chacun, en entrant chez lui, redécouvrirait l'espoir et l'amour. Serais-ce en des temps si lointains ? Oui, si tu étais la ville, serais-tu l'utopie ? Si tu étais la ville tu serais une figure révoltée. Tu combattrais le temps, et même l'idée que l'on se fait du temps. Si tu étais cette ville où je passe, Muse, je marcherais dans la lumière. Je sentirais ce qu'est l'espoir, ce qu'on appelle les beaux jours alors ma route serais éclairée. Si tu étais la ville tu serais une simple rue, une petite terrasse de café, discrète, tu serais la table où je viendrais écrire. Sous les rayons de soleil d'une fin de journée tout s'apaiserait, tu commencerais ta soirée. Des rues soudainement désertées, traversées par l'onde sonore des grandes cloches. Alors je déciderais de mon destin, je déterminerais mon lendemain. Tu serais ma ville, je ne serais plus l'errant mais celui qui t'accompagne. J'aurais vu ces milles fenêtres orchestrer l'énergie lumineuse et chaque rayon serait un faisceau éclairant nos consciences. J'aurais découvert quelques-uns de tes jardins secrets, devenus pour moi des lieux de résurrection, mes espaces de renaissance. Lieux parfumés aux senteurs fraîches comme le printemps et chaude comme l'été. Lieux de l'intime, si tu étais la ville, ces jardins seraient ceux de la paix, du sommeil et du rêve. J'y verrais l'herbe sauvage cultivée en plein centre de la ville. Si tu étais la ville, je serais enfin hors du temps. Si tu étais la ville tu serais l'étoile brillante au centre de la poitrine de l'homme qui à la foi.

Café à coté de la cathédrale. Je suis comme un véritable touriste, un vacancier qui se promène dans la ville, un voyageur. Je vis ainsi avec le soleil et la lumière, je "passe" de terrasse en terrasse et j'entends les mille langues des vrais touristes. Et je pense à toi, Muse, je pense au soleil qui est ta nature, à la chaleur qui t'accompagne, à cette lumière que j'aime tant. Ce soir sera un grand jour. Le jour J... J. comme Joie, et tous les comédiens, et toutes les comédiennes et tous les voyageurs de la terre te rendrons hommage, ils boiront un verre à ta santé, à la chance, à la réussite de tes entreprises. Car tu seras une figure. Moi je me promène un peu dans la ville, alors tu deviens la ville, chaque pierre, chaque mur, chaque fenêtre, chaque voûte, devient quelque chose de toi, Muse. Tu es partout. Si tu étais cette ville, ton parfum me parviendrais, plein de ces fraîcheurs vertes et légères. Si tu étais la ville, tu serais l'heure de l'angélus, au-delà des murs d'enceinte de la ville. Si tu étais la ville, pour moi, tu saurais être le labyrinthe. Et je choisirais de perdre le fil, pour mieux me perdre moi-même, en ton sein. Et dans ce déambulatoire, je dirais mes écritures en hypertexte. Je parcourais le moindre de tes recoins, j'aurais la patience de celui qui n'attend plus rien mais qui espère tout. Si tu étais la ville où je suis, j'en serais le paradoxe, et sans discontinuité je mènerais mon histoire jusqu'au seuil de ton temple. Je regarderais chacune de tes fenêtres, j'en contemplerais l'architecture, humaine et divine. Il ne manquerait que la musique que tu écoute et que j'écouterais à mon tour. Si tu étais la ville, je voudrais être en voyage et je prendrais tous les billets pour toutes les visites. Je saurais m'éloigner de toi pour mieux revenir te saluer. Si tu étais une Cathédrale, chaque éclat de lumière transfigurerait tes murs en autant de jeux colorés. Tes pierres ne seraient plus minérales, transparentes dans ses ouvertures mais sensuelles comme une pensée de chair. Muse, ô ! Muse, Muse des Muses, si tu étais un vitrail, tu serais l'eau, je serais le porteur de tes voyages infinis.


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