André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas
Inscrit: 1-2005
| Envoyé samedi 05 mars 2005 - 11h11: | |
D’après Terre et mer 23 (no 59) Si vous pénétrez en ce lieu, il change aussitôt d’identité. Vous croyez le parcourir, vous croyez percevoir l’éclairage qui l’habite, l’espace où ses deux couleurs sont disposées ; mais il n’y a que vos pas et rien d’autre, il n’y a que vos foulées silencieuses. Celles-ci font naître des fleurs qui lentement propagent leur grâce, leur climat de soie. Si vos regards sondent le courant figé qui les porte, les remous immobiles de cette sorte de fraîcheur, vous verrez sous vos paupières (ou sous d’autres cloisons qui remuent) vous verrez des êtres à l’allure bleue se balancer au bout de vos cils – au bout de fils. Leurs voix reproduisent les chansons ou les récits que vous aimez particulièrement entendre. Quelques-uns prétendent qu’il s’agit non de vos pas mais de mouvements de fuite déclenchés par votre approche. « Eloignez-vous ! conseillent-ils, et vous verrez que le lieu précédent reviendra, à la manière d’une marée montante. » Flux qui traînerait alors avec lui mille et mille débris, pierres brisées, segments de métal, fragments de plastique, papiers gras, ossements, chevelures innommables ; toutes choses dont le remuement et les éclats font croire au spectateur qu’il voit des parois de jais suaves et des parterres fleuris ; toutes choses qui s’entrechoquent et peuvent résonner comme voix, phonèmes ou chansons, à des oreilles hallucinées. |