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Tm (Tm)
Identificateur : Tm
Inscrit: 1-2005
| | Envoyé mercredi 30 août 2006 - 13h34: | |
"-Je crois que la beauté, à mesure qu'elle approche de la perfection, tend à s'emplir d'épouvante, et que, si nous pouvions comprendre à fond ce que nous voyons, la beauté à son apogée nous apparaîtrait d'une hideur désespérante. Le nom de la Beauté suprême est Démence. L'homme devrait donc chercher la grâce plutôt que la beauté; ainsi il aurait toujours une amie auprès de lui pour le comprendre et l'encourager -ce qui est l'affaire de la grâce. Tandis que l'affaire de la beauté, nul au monde ne sait ce que c'est. La beauté est cet extrême qui n'est pas encore allé rejoindre son contraire pour s'y fondre. Les poètes l'ont chantée, les philosophes l'ont annoncée, en s'imaginant que la beauté qui dépasse l'entendement était aussi la paix qui dépasse l'entendement. Mais je crois que tout ce qui dépasse l'entendement, qui est imagination, est terrible, parce que cela s'écarte de l'humanité et de la bonté, et que c'est là un crime contre le Saint-Esprit, le grand Artiste. Une perfection prise isolément est un symbole de terreur et d'orgueil et c'est la tête seule de l'homme qui la suit: le coeur recule épouvanté, pour s'attacher à cette grâce qui est modestie et droiture. Tout extrême est mauvais, et ceci à seule fin qu'il aille rejoindre son contraire, aussi horrible que lui, pour le féconder."
James Stephens (romancier irlandais, 1882-1950), LE POT D'OR. (Ed. Terre de Brume). |
Tm (Tm)
Identificateur : Tm
Inscrit: 1-2005
| | Envoyé mercredi 30 août 2006 - 13h51: | |
"-Venez à nous, vous qui ne savez plus où vous êtes -vous qui demeurez parmi des étrangers dans des demeures lugubres et pharisiennes. Pauvres empruntés que vous êtes! Que vous voilà égarés et ensorcelés! Vous avez l'air ébahi et ne comprenez pas que vous avez le regard fixé sur une étoile et que vos pieds se meuvent dans le bienheureux domaine des fées. Innocents! En quelles prisons êtes-vous jetés? A quelle bassesse vous ravalez-vous? Comment êtes-vous broyés entre les lois et les coutumes? Le noir peuple du Fomor vous tient en servage; ils vous ont mis autour de la tête un cercle de plomb, des chaînes au coeur, et autour de la taille une ceinture d'airain, qui s'imprime en vous douloureusement! N'en doutez pas: le soleil luit, les fleurs poussent, dans les arbres les oiseaux chantent la gaîté. Les vents promènent partout leur liberté, l'eau dévale les coteaux, l'aigle pousse son cri dans la solitude et sa femelle accourt. Les abeilles récoltent leur miel en plein soleil, les cousins dansent ensemble et, de par delà la rivière, le grand taureau beugle. La corneille dit un mot à ses soeurs et le roitelet tient ses petits au chaud dans la haie... Venez à nous, vous qui aimez la vie et le bonheur... Tendez la main -de loin un frère la prendra. Laissez pour un moment la chaleur et la charrette, mettez de côté l'aiguille et l'alêne... Ce cuir-là, ô homme, est-ce ton frère?... Venez-vous-en, venez-vous-en! Du métier où vous tissez, du bureau, de la boutique où pendent les quartiers de viande, de celle où l'on vend les habits et du lieu où on les coud dans l'obscurité... Oh! la noire trahison! Est-ce pour ton plaisir que tu restes là dans ce repaire de courtier, homme pâle? L'avoué te tient-il par un charme... Venez-vous-en! On s'est mis à danser légèrement, le vent passe avec sa musique sur le coteau, le soleil emplit de son rire la vallée et la mer saute sur les galets, haletante de joie, à danser, danser, danser de joie..."
(Id.) |
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