André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas
Inscrit: 1-2005
| Envoyé mercredi 28 septembre 2005 - 15h34: | |
ALLÉGORIE ET SYMBOLE Il importe de ne pas commettre la confusion trop courante entre allégorie et symbole. L'allégorie est inoffensive ; elle énonce sous une forme généralisée ou personnalisée ce qui est déjà connu ou connaissable d'une autre manière; elle se maintient au même niveau d'être que ce qu'elle «allégorise». Le symbole annonce une correspondance avec quelque chose d'autre qui, à un plan donné de l'être, ne peut être «chiffré» autrement que par lui; sa signification vraie transcende le plan où il est énoncé «à la lettre», invitant la méditation à la poursuivre et à la comprendre à un niveau supérieur. Pas davantage donc, comprendre un symbole ne consisterait à désymboliser le texte qui assume la fonction symbolique. Ce qui désymbolise, c'est tout au contraire l'attitude du littéraliste qui en reste à la lettre close et est incapable de lire en transparence; c'est pour cette attitude que précisément il n'y a pas de symboles. Avant tout donc, le symbole présuppose l'existence de plans de conscience et de niveaux d'être qui se superposent; déchiffrer les symboles, conférer à un texte sa signification symbolique, c'est «faire symboliser» ces plans les uns avec les autres. À chaque plan d'univers, un même texte se fait entendre à une octave différente. Expliquer un symbole, c'est effectuer ce passage, cet exhaussement, entendre à chaque niveau ce qui en est la vérité littérale correspondante. Ce n'est donc nullement faire disparaître l'énoncé symbolique, car celui-ci continue de valoir au plan où il est énoncé, et où il faut chaque fois le retrouver pour effectuer le passage. Henry Corbin in TRILOGIE ISMAÉLIENNE (Ed. Verdier) |