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Abîmes poétiques : le forum » Vos textes (publication libre) » Archives : octobre 2004 - mars 2005 » - ? - « précédent Suivant »

Auteur Message
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé mardi 08 mars 2005 - 12h57:   

Nul n’en dit mot
L’indicible nous est une souffrance
ne nous fournit pas une seule similitude
Séparés de toute substance,
flottent, inutiles, nos cinq sens
Qui ne l’éprouve ne saura ce que c’est
Tm (Tm)
Identificateur : Tm

Inscrit: 1-2005
Envoyé mercredi 09 mars 2005 - 13h36:   

Et pourtant, tu en parles (fort justement, certes)!
Est-ce que tout discours ne tourne pas toujours autour des choses?
Je pense au coq de Platon...
S'agissant des choses intimes: a fortiori.
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé mercredi 09 mars 2005 - 23h47:   

Je ne ressens pas, pour l’instant, ma vie comme une maladie, et ne suis pas Socrate. Donc, probablement, pas de coq à Esculape. C’est l’indicible, même celui des choses, qui me tourmente. Vouloir dire l’indicible : faut-il être bête !
Tm (Tm)
Identificateur : Tm

Inscrit: 1-2005
Envoyé jeudi 10 mars 2005 - 10h40:   

Aussi ne te soupçonnais-je pas de vouloir dire ce qui ne peut l'être: pas de méprise! Je tentais de dire qu'à parler de l'indicible, le discours nous en permet t.t de m.me une approche.
Par ailleurs, je faisais allusion au coq que je ne sais plus quel cynique avait jeté déplumé (pauvre bête!) en public, interrompant ainsi un discours où Platon prétendait donner une définition suffisante de l'animal. Ne sais plus où j'ai lu cela (dans un livre de Michel Onfray, je crois, que ma flemme m'empêche d'aller chercher pour vérifier!).
Bien heureux -je t'en assure- de te savoir sans le souci d'Esculape!!!
Tm (Tm)
Identificateur : Tm

Inscrit: 1-2005
Envoyé vendredi 11 mars 2005 - 13h34:   

Ah! Voilà:

"La théorie des Idées défendue par l'auteur du "Phédon" ne pouvait guère plaire au sage à la lanterne. Dans sa folie des définitions, Platon avait serti une phrase qui lui semblait rendre exactement compte de l'homme devenu pour l'occasion un bipède sans plumes... Les platoniciens trouvaient le mot juste et la classification opératoire, mais pas Diogène qui, dans son coin, préparait une contre-démonstration de facto: après avoir plumé un coq et jeté l'animal dans toute sa nudité au beau milieu d'une réunion présidée par Platon, le cynique fit, silencieusement, la démonstration que la définition était inadéquate et qu'en tout état de cause, on ne saurait réduire le réel au concept, aux mots. D'où l'usage du coq à des fins nominalistes..."

Michel Onfray, "Cynismes."

(On ne nous dit pas ce qu'en pensa le coq...)
Nicole (Nicole)
Identificateur : Nicole

Inscrit: 7-2001
Envoyé vendredi 11 mars 2005 - 15h00:   

Je cite le poète Tucnev....

...."Tais toi, va-t-en et cache
Tes sentiments et tes pensées
Que dans le profond de ton âme
Elles se lèvent et se couchent
comme les étoiles de la nuit
Regarde-les et tais-toi"...

Regarder son Etre, claquemuré en lui, dans sa puissance et son misérabilisme crevant somme toute de solitude.
Petit miracle en nous, éclot la fleur d' Espoir faiseuse de sens pour un temps, parce que, vient la question du sens du sens.

L'amour, c'est toujours cela de pris, un indicible qui nous pousse dans le firmament.

Alors, j'écris.....

Quelque part au fond
nous autres
sommes bien seuls
Notre désir d'Amour
reste un rêve fou
qui s'échoue sur les rives
de la réalité

Bien à vous.
Nicole
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé vendredi 11 mars 2005 - 15h47:   

On raconte que le divin Platon, voyant le coq déplumé, aurait ajouté ces mots à sa définition de l’homme : “et qui a des ongles plats et larges.” Ce qui, à cette occasion, n’était pas faire preuve de grande divinité.
Il reste que je préfère Platon à Diogène, même si le premier nommé est parfois bavard.

Qui est Tucnev ? Son poème me semble avoir pour origine une expérience d’ordre mystique.
Mais comment penser sans mots ? Ou alors, pourquoi ne parler qu’à soi-même, ne penser que pour soi ? N’y aurait-il pas là un danger ?
"La fleur d'Espoir faiseuse de sens", Nicole, et "l’Amour plus fort que la mort".
Nicole (Nicole)
Identificateur : Nicole

Inscrit: 7-2001
Envoyé samedi 12 mars 2005 - 10h47:   

Répondre à André par deux haïkus

Dans la solitude
Il y a de grands espaces
Tout blancs et tranquilles

Au fond du silence
As-tu déjà écouté
La terre qui tourne


Et un tanka……

Juste envie de ciel bleu
dans ma tête
Juste envie de planer
dans mon coeur
Comme un albatros
loin de tous les mots

La pensée est un flux de conscience, lorsque je me sens albatros, nez dans les étoiles en moi, je vogue sur mes états de conscience, ne réfléchis pas réellement, spectatrice de moi-même. Loin de l'agitation du monde.
Nous n'avons pas toujours mis des mots sur la pensée.....et nos pensées selon les cultures ne sont pas toutes identiques, notamment au niveau des représentations du moi.Le logos est un formidable moyen de communication.Se sentir comme centre du monde, et regarder pousser son deuxième nombril, peut-être une tendance actuelle qui tourne la pensée de plus en plus vers soi et pour soi. Carpe diem.
Pour le reste, ce n’est pas en deux mots que l’on résoudra le problème du logos, du dire et du non dire, des raisons de dire, du pourquoi dire ou comment dire. Les choses qui ne parlent pas ont pourtant quelque chose à nous dire…..la question reste de savoir (Berkeley) quel statut aurait une réalité débranchée de toute perception et conception ? Nous ne pouvons ignorer notre Dasein, et la parole lui est sans doute symbole, Darstellung (représentation). En- delà de notre dire (se parler à soi), du dire (communiquer), il y a les bruits du monde et notre turbulence animale. L’esthétique de la poésie, est sans doute une manière de résoudre une tension entre l’indicible et le dicible. Tout dire est la tentation d’enlever la tension entre ce dicible et cet indicible en nous et dans nos relations. Tous des Diogène en puissance. Tout n’est-il pas affaire du dedans au dehors et du dehors au-dedans. Le danger de ne parler plus qu’à soi, ne plus vouloir de représentation du monde, se reflète peut-être dans une rupture de celui-ci et se lèvent folie, autisme…..
L'amour m'est tension vers un bonheur tout ontologique, quête, au-delà des mots, il se vit, se fait, esquisse toute la complexité du mystère de soi et de cet Autre, si pareil et si différent, posés dans le monde. Magique.

Etc, etc.

Bien à vous
Nicole

PS. Peu d’info sur ce Tucnev, sinon qu’il a été cité lors d’une traduction de Pouchkine.
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé samedi 12 mars 2005 - 12h47:   

-La solitude silencieuse a parfois quelque chose d’incantatoire. Quand on y est (me dit un ami qui en fait régulièrement l’expérience, et qui ne ment jamais), indépendamment de notre volonté, le silence se met à vibrer et l’on devient soi-même, corps et âme, partie intégrante d’une seule vibration infinie. L’espace et le temps semblent alors s’annuler. Mais attention ! Quand cela lui arrive, cet ami – qui est très sage – me dit qu’il lui vient toujours à l’esprit ce verset du Qohèlèt : “Malheur à l’homme seul, car s’il tombe il n’aura personne pour le relever.” (Ecclésiaste 4 :10). Et l’ami rentre au bercail.

-Ton second haïku est immense. Quelque chose d’indicible y est dit, précisément.

-Amare amantibus est esse, a dit un Maître ; i.e. : pour les amants, aimer, c’est être.
Nicole (Nicole)
Identificateur : Nicole

Inscrit: 7-2001
Envoyé samedi 12 mars 2005 - 19h45:   

Oui, André, sans doute dans l'amour fait-on l'expérience de notre puissance d'être.
On s'y sent tellement vivant et joyeux!
Et cette faculté qu'un autre a de prendre possession de nous, corps et âme, fou....
Tout prend sa forme, les nuages, le soleil, la terre, la mer, l'oiseau qui passe.
Plus de vide, plus de silence, plus de pourquoi, c'est et c'est tout.
L'envie que cela dure toujours.
Et viennent nos pauvres indicibles mots, éternité qui rime pour les amants avec toujours.
De cette expérience là, on ne revient pas toujours indemne.
La belle affaire! Ce qui importe c'est d'apprendre ce que aimer veut dire, heureux celui qui a vécu la passion.
Sans doute les mystiques au travers de la foi se tiennent-ils dans cette sorte d'état et parlent du Paradis.
Le verbe aimer se conjuque à tant de temps.

Allez va pour un presque haïku.

Quand on n'aime plus
elle s'aplatit
la vie

Ton ami est bien sage, prends-en grand soin et salue le de ma part.

Bien à toi.
Nicole
Tm (Tm)
Identificateur : Tm

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 14 mars 2005 - 9h46:   

"heureux celui qui a vécu la passion", dis-tu, Nicole.
La passion est ce qui nous porte au faîte de notre sensibilité, ce qui nous fait découvrir l'extase. Nous découvrant tout le feu qui nous anime. Belle et enrichissante expérience!
Mais elle est aussi un "feu qui brûle mais n'éclaire pas" (Montherlant, "La Ville dont le prince est un enfant"; cf. aussi ce qu'il dit de l'adolescence dans "La Relève du matin": très contestable par certains aspects, mais si beau!).
Et quand on sait que la passion a un objet, tout se corse. Je parle de la passion amoureuse. Si elle est réciproque, c'est l'Eden retrouvé! (Pour combien de temps?). Mais dans le cas contraire, quel enfer!!! Car la passion (amoureuse) est dépossession de soi, aliénation.
Si, pour ma part, j'en garde précieusement la magique irradiation, il ne m'en a pas moins fallu toute la force de ma pauvre raison, fort mise à mal, pour me retrouver parmi les vivants.
Passion, ne l'oublions pas, est souffrance. N'en est-il pas un qu'elle a crucifié?
Tm (Tm)
Identificateur : Tm

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 14 mars 2005 - 10h10:   

C'était la Passion pour l'Homme du Fils de l'Homme, voulue par le Père... Je m'y perds!
L'homme le méritait-il? Ingrate passion!
Déçu, le passionné a le choix entre le détachement absolu; mais celui-ci ne va-t-il pas jusqu'à nier la raison? Cf le Bouddha.
Le désintéressement de soi, don total à autrui; ne faut-il pas être un héros, un "surhomme"?
Ou encore le tranquille épicurisme égotiste du dernier Jean-Jacques, celui des "Rêveries..." (jouissance du Dasein?); n'est-ce pas là faire preuve d'égoïsme?
Si mon coeur ne balance plus guère, ma raison, elle, n'a pas fini d'osciller!
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 14 mars 2005 - 12h09:   

J’ai revu mon ami, ces jours derniers. Je n’ai pas pu lui transmettre le salut de Nicole, que je n’avais pas lu avant de partir. Je le ferai la prochaine fois : dans quelques semaines, si tout va bien. Il habite assez loin de chez moi. N’a ni téléphone, ni ordinateur. Ne répond pas aux lettres. Singulier, mais un peu pénible.

Il dirait probablement à Tm que la raison est une faculté à laquelle on ne peut se fier sans réserve ; qu’elle est le propre de l’homme et que l’homme a si souvent errer, même en la (la raison) prenant pour assise.
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 14 mars 2005 - 12h12:   

Babil de l’air dans l’herbe
où pirouette, extatique, un être de douceur
et jette des notes jubilantes
parages que la lumière distend jusqu’à l’horizon
contexte dilaté
ailes qui bondissent, libres flammes
dans la verrière immense
Tm (Tm)
Identificateur : Tm

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 14 mars 2005 - 19h25:   

Quand j'étais mousse, il m'arrivait souvent de rêver devant l'immensité de la mer... Le capitaine alors me bottait le train en citant le "Roi Lear" de Shakespeare:
"Comprends-tu qu'il nous suffit d'un rien de trop pour être?" tempêtait-il.
Et je me remettais à briquer le pont en maugréant je ne sais quel sabordage!
Or, maintenant que j'ai rejoint mon île, je n'ai plus que des galets à polir, laissés là par quelque obsessionnelle éternité...
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 14 mars 2005 - 20h57:   

Je ne sais pas si j’ai bien compris ce que tu veux dire. Je te réponds toutefois que les capitaines qui citent Shakespeare se font rares ; que ceux qui savent qu’il suffit parfois de polir des galets pour être n’osent peut-être plus le dire ; d’autres n’ont peut-être pas la voix assez forte pour se faire entendre - le vacarme est si grand.
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé jeudi 17 mars 2005 - 12h49:   

Les mains sur les hanches,
face à la mer démontée,
un petit garçon.
Nicole (Nicole)
Identificateur : Nicole

Inscrit: 7-2001
Envoyé jeudi 17 mars 2005 - 22h07:   

Comme une envie de citer tout un passage sur le mythe de la création tiré du Banquet de Platon....explication de l'amour, de nos attirances....

La philo, les passions positives et négatives,
la passion dont tu parles, TM, est une passion négative....

Une autre envie, celle de parler de Spinoza, qui nous tient en haleine dans son Ethique, nous faisant naviguer (ton petit garçon, André, est bien mieux sur la plage, ne l'embarque pas dans cette histoire là) de scories en démonstrations et en cqfd pour nous dire que:

"L'Amour est une Joie qu'accompagne l'idée d'une chose extérieure".

L'amour serait ainsi un passage de transformation dans l'idée de la joie.

Je ne comprends pas trop "le rien de trop" ou alors est-ce un peu l'idée de Burke, de ses passions relatives à la conservation de soi. Soit puisque nous ne pouvons nous contenter de vivre dans l'immobilité, dans le sens ou le simple fait de respirer ne nous apporte aucun plaisir ou encore dit autrement, le simple fait d'être en vie et en santé est un plaisir qui nous fait être un Etre indolent et inactif (toujours selon Burke).
La passion nous rend follement vivant!

Je suis très touchée par la belle image d'André.
Je lui réponds par une autre,histoire de quitter notre vision anthropologique du monde.

La mer se retire
marquant de ses caresses
la plage nue

Bonne fin de semaine, et si tu croises ton ami, André, n’oublie pas de lui dire que……

Bien à vous
Nicole
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé vendredi 18 mars 2005 - 13h01:   

L’amour, généralement, ne va pas sans rhétorique. Ce sont les lettre d’Héloïse à Abélard que je trouve les plus stupéfiantes (épithète prise positivement ici : Abélard est tout, pour elle, même Dieu – et nous sommes au moyen-âge…) La phrase la plus énigmatique, la plus profonde, je veux dire celle dont on n’épuisera probablement jamais tout le sens, ou tous les sens, est celle de Jésus de Nazareth : “Aime Dieu - et ton prochain comme toi-même.” Son corollaire : “Aimez ceux qui vous haïssent” a de quoi stupéfier aussi. Telles sont mes trois références principales sur la question.
André Carruzzo (Dreas)
Identificateur : Dreas

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 04 avril 2005 - 11h47:   

Nicole avait écrit :

Au fond du silence
As-tu déjà écouté
La terre qui tourne

Hier, j’ai récité ce haïku en présence de mon ami l’anachorète et lui ai présenté les salutations de la susnommée, ainsi qu’elle me l’avait demandé.
Réponse de l’ermite : - Es-tu sûr qu’elle existe, Nicole Internet ?
- Mais quelqu’un a bien dû écrire ce haïku !
- Quelqu’un, c’est presque personne. C’est un fantôme.
- ? ! … Mais les auteurs qu’on lit, on ne les voit pas non plus.
- Si tu lis n’importe quoi et n’importe qui, d’accord ! Mais si tu lis les textes essentiels, c’est un peu comme si tu te lisais toi-même.
- ? ! … J’avais l’impression de me lire moi-même en lisant ce haïku.
- Alors là, je ne te crois pas ! Ecouter la terre qui tourne ! L’illusion, c’est … (a suivi une longue dissertation sur l’illusion ; sur le fait qu’il faut prendre pour base le Soi, pour l’éviter (l’illusion donc), etc. etc.)

Rude bonhomme.
Tm (Tm)
Identificateur : Tm

Inscrit: 1-2005
Envoyé lundi 04 avril 2005 - 11h50:   

Ton anachorète n'est pas sans me rappeler mon capitaine!

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